Les élèves de l'ENSP déployés au cœur de la gestion de crise (partie 2)

Dans notre précédent article nous vous étions allés à la rencontre de Céline GRAMOND, élève commissaire déployée sur le terrain, comme une grande partie de sa promotion, afin de renforcer les effectifs de sécurité publique. Aujourd'hui c'est au tour d'Aloys GROSSMAN de répondre à nos questions.

Sous couvert d’ordres de mission délivrés par le directeur de l’ENSP, Aloys a été déployé à la préfecture de Police de Paris. Depuis le 25 mars. Il a pour mission d'équiper des postes au cœur de la cellule interministérielle de crise (CIC) basée au ministère de l’Intérieur. Cette salle de crise est découpée en deux cellules : Situation et Thématique. Ces postes étaient jusque-là équipés par des cadres de la DSPAP et de la DOPC. La mise à disposition des élèves de l'ENSP permet donc aux services actifs de conserver ces cadres en leur sein. Il nous raconte son quotidien.

Avant toute chose comment allez-vous ?

Je vais bien, j'ai la chance d'être confiné dans un espace pas trop petit bien que manquant d'un espace extérieur. Le plus compliqué est pour le sport, les salles ayant fermé alors que j'étais plutôt accroc à celle mise à disposition à l'ENSP !

Racontez-nous votre quotidien. Comment cela se passe pour vous ?

Grâce à l'excellente plateforme en ligne dont nous disposions déjà (Moodle) je peux poursuivre les révisions sans souci. En dehors de ce temps d'étude je profite du confinement pour lire et tenter de continuer à faire une activité sportive à l'intérieur via des exercices de poids du corps. Le temps est plutôt distordu, tantôt rapide tantôt lent, c'est assez peu naturel de rester comme cela en intérieur.

Quelles sont vos missions principales ?

J'étais pour ma part dans la salle situation, il s'agit de rapporter les évènements du moment qui peuvent intéresser l'exécutif, et nous faisons office de liaison entre eux et le cabinet de la préfecture de police. En cas de demande spécifique nous nous chargeons d'obtenir les éléments. Par exemple les chiffres de contrôles liés au Covid 19, les décès suspects, les décès de collègue ou bien par exemple du personnel médical/des caissiers et autres professions exposées qui peuvent avoir un impact politique. Afin d'éviter que celle-ci soit HS en cas d'infection, une rotation est prévue ce qui fait 2 vacations tous les 10 jours environ.

En quoi la crise sanitaire actuelle change-t-elle le travail quotidien des effectifs sur le terrain 

Le judiciaire est entièrement à l'arrêt, les tribunaux ne peuvent pas gérer le flux ce qui a fait drastiquement chuter le taux de condamnation, les prisons sont également vidées du fait des émeutes occasionnées par l'épidémie. Pour le commissariat où j'étais affecté, l'activité a tout de même réduit du fait de l'absence des touristes et parce que le peu d'infractions constatées sont élucidées grâce aux caméras de vidéosurveillance permettant d'appréhender les auteurs peu discrets du fait du confinement. Néanmoins, il semble que les contrôles occasionnent des outrages, et de nombreux faits de personnes se déclarant infectées et toussant ou crachant sur les fonctionnaires sont constatés par la DSPAP.

Arrivez-vous à travailler sereinement tout en ayant, aussi, vos cours à assimiler en distanciel ?

Le nombre limité de vacation permet tout à fait de prendre le temps. Le bémol porte plutôt sur les cours de Techniques à la Sécurité en Intervention, et de rédaction de procédure pénale qui nécessitent des actions de manipulation avec les armes et les TSI ou bien des logiciels pour ce qui est de la PJ. Néanmoins la « Moodle » a été bien remplie en terme de structuration des procès-verbaux, permettant d'appréhender le second stage (dominante PJ) avec sérénité.

Cette situation particulière fait-elle écho à votre futur rôle de cadre de la Police nationale? En quoi ?

Malheureusement en l'état, au-delà de la thématique de protection des fonctionnaires en leur donnant les moyens de se protéger contre le Covid, notre emploi actuel permet peu de nous projeter dans des thématiques de cadre de police. Les élèves déployés en DCSP sont d’avantage exposés à ce rôle.

Que retiendrez-vous de cette immersion sur le terrain ?

Ce fut intéressant d'observer le fonctionnement d'une salle de crise et d'avoir pu rentrer dans la salle des fêtes de Beauvau. En revanche, les tâches à effectuer ne sont pas assez opérationnelles pour pouvoir retenir des spécificités. Le stage Gardien de l'hiver dernier était extrêmement instructif et reste ma réelle immersion à ce stade de ma scolarité. Je le vis par procuration en appelant les commissaires avec qui j'ai gardé contact, et en obtenant les témoignages des élèves projetés en province.